Ce post reprend l'intégralité de l'article publié le 12 juin 2023 sur le blog nimentretiens.canalblog.com

En ce soir humide du balbutiant juin nîmois, entre éclaircies et nuages noirs, entre un groupe de buveurs et le boxon du boulevard Victor Hugo, l’écrivain Laurent Mut, assis à une table aux frontières entre la terrasse et le bitume, nous a donné rendez-vous au bar Le Napoléon pour nous parler de la sortie d’A Fleur d’épée, son premier livre déjà disponible sur son site internet www.laurentmut.com et bientôt en vente à la sortie des arènes, mais aussi plus largement d’art, de Van Gogh, de taureaux, de Juan José Padilla, de García Lorca, de Morante de la Puebla et d’une étrange Chevelure…
Entretiens Taurins : Laurent bonjour, tu es un jeune écrivain aficionado, tu publies bientôt ton premier livre A Fleur d’épée mais tu es aussi l’auteur des textes de La Chevelure d’André, une petite page taurine qui monte sur Facebook. Sur cette page, on comprend que tu parcours la France et l’Espagne pour voir des corridas. J’ai envie de te demander pourquoi.
Laurent Mut : Peut-être pour m’approcher toujours plus d’une certaine vérité que j’ai dû pressentir à moment donné dans la tauromachie, mais dire exactement pourquoi, c’est un peu compliqué…
E.T : Pourquoi en voir autant et aller si loin ?
L.M : Parce que c’est par la répétition qu’on atteint la profondeur et cette profondeur-là, je la cherche, moi, en littérature, et je crois que c’est aussi un des buts de la corrida. Dans la corrida, c'est toujours le même format : un taureau est combattu en trois tiers jusqu’à sa mise à mort, dans le troisième tiers on enchaîne les passes de muleta et ces passes de muleta sont souvent vues comme identiques, des derechazos, des naturelles... chaque torero les a dans son répertoire. Il en résulte d'ailleurs parfois un aspect répétitif. Ces passes, on dit que ce sont les mêmes mais en réalité, dans la figure imposée, il se passe toujours quelque chose de différent qui tend, en principe, à rechercher la profondeur. Et c’est justement par la répétition du geste qu’on avance vers cette profondeur. Peut-être que ma volonté de toujours retourner à la corrida, d’y aller beaucoup et de répéter mes voyages, que ce soit en Espagne ou en France, peut-être… oui… peut-être que ça tient du désir d’aller chercher toujours plus ce fluide profond, ce quelque chose qui se passe et qui fait, comme en tout art mais encore plus dans la corrida, qu’on touche une part indicible de la vérité.
E.T : Tu parles de vérité en art. Ton premier livre va peut-être dans ce sens. Peux-tu nous en parler ?
L.M : Je l’ai écrit pendant l’hiver 2018-2019. Ce n’est pas un roman ni un essai, c’est quelque chose qui est véridique. J'y relate mon premier voyage en Espagne après que j’aie repris contact avec la corrida, parce que je l’avais un peu… pas délaissée… mais j’y allais moins et en 2018, j’ai entrepris ce périple qui était comme une flèche, une descente vers le sud et qui m’a permis d’aller toujours plus au contact du taureau. J’en ai tiré un livre parce que je n’ai pas voyagé pour écrire. C'est en le vivant que j'ai senti qu'il allait falloir que j'en fasse quelque chose. Si on veut tenter de résumer, au début du texte, je pars de Nîmes pour me rendre à Valencia. Après m’être embarqué, très vite, je trouve tout un tas de lieux liés à des souvenirs taurins, des paysages, des événements qui me rappellent un thème ou une image et qui ressurgissent à travers le voyage. On y voit par exemple la féria de Céret vécue dix jours avant, Barcelone découverte dix ans avant… tout ça se mélange pour faire le portrait de l’âme et de l’état d’esprit d’un aficionado tourmenté, exalté, qui va chercher à Valencia le point final du livre…
E.T : C’est donc plutôt un récit de voyage…
L.M : Exactement. J’ai voulu écrire un livre qui fait la part belle au déplacement dans l’espace et à la prise en compte du temps. A ce titre, j’ai voulu trouver une rythmique de la phrase pour essayer de dépeindre celle de la corrida. Parce que la corrida est aussi la volonté de reprendre à son compte l’espace et le temps. La tauromachie et le récit de voyage vont très bien ensemble. Ils s’accouplent à merveille. Dans la corrida, il y a le voyage du taureau qui part des champs vers les arènes, de la campagne à la ville, mais aussi le voyage du torero, en camionnette, de ville en ville et de l’hôtel jusqu’aux arènes et puis là, à l’intérieur de l’arène, le cœur des choses, le taureau voyage jusqu’au torero qui, lui, voyage vers le centre de la piste et après toutes ces traversées, enfin, les deux se rencontrent pour qu’en découle une œuvre éphémère. Et là encore on parle de voyage. On dit souvent du bon taureau, celui qui charge bien et permet plus de profondeur dans l’art de la passe, qu’il a un bon voyage…
E.T : Et toi dans tout ça ?
L.M : Moi, modestement, avec ma plume, j’ai voulu cadencer, rythmer, mêler mon propre voyage pour faire apparaître ces déplacements d’espace et de temps dans un monde qui, par vitesse, par prédominance de l’image, du cloud, de l’instantané, du fil d’actu’, de l’archivage, de la vente du lieu et de la carte Google Maps, se retrouve à nier la vérité même de l’espace et du temps. Je crois qu’aujourd’hui la corrida est transgressive parce qu’elle fait de l’art en reprenant à son compte ce que la société ne veut pas voir, et parmi tout ce que la société ne veut pas voir, outre le sang, l’héroïsme cru, la liturgie et la mort, il y a l’espace et le temps. Regarder en face la vérité de l’espace et du temps, c’est accepter de se sentir minuscule, infime, insignifiant par nature. Une fois cette insignifiance admise, il reste à trouver le moyen de la surmonter, de la vaincre, au moins symboliquement. La tâche est titanesque. On comprend bien qu’il est impossible de la prendre à bras le corps tout en travaillant sans autre but que celui de subir la société du divertissement minuté. La corrida, en revanche, s’attelle à cette tâche. Si on prend par exemple la passe de muleta, elle se fait en plusieurs temps qui cadencent le déplacement du taureau et du torero dans l’espace. Parar, mandar, templar… et là, d’un coup, l’ensemble de tout ce qui se déplace sauvagement et de façon chaotique devient quelque chose d’harmonieux… si ça c’est pas une reprise à son compte ! On accepte le mouvement, on ne se fige pas, on agit. L’œuvre est là. Il suffit de la faire. C’est grâce à ce tour de force que le torero se sent libre. L’écrivain, de son côté, a des chances de se sentir libre en sondant les choses que le monde refuse de voir. Je me coltine l’espace et le temps. C’est un de mes champs de lutte. Et ça va très bien avec mon afición pour les taureaux. C’est entre autres pour ça que je crois qu’écrire sur la corrida, c’est se rapprocher toujours plus de la liberté.
E.T : Tu viens de dire que la corrida était mêlée aux idées de profondeur et de vérité en art. L’écrivain aussi peut parfois se retrouver dans une situation où il donne énormément de lui-même. Toi, en tant qu’artiste, te sens-tu plus proche du taureau, du torero, du ganadero ?
L.M : Le taureau, pour moi, dans ce cas de figure, c’est la représentation ultime et immédiate de la dangerosité, d’un risque à prendre à un moment donné pour s’ouvrir en tant qu’artiste et mettre sa propre sensibilité en évidence. Le torero, je ne me sens pas proche de lui, je le trouve fascinant, c’est vers lui que tend ma perception des choses et c’est à sa place que je me mets parce je ressens une complicité artistique. Par contre, à ma différence, il a non seulement cet impératif de s’exprimer devant un public dans l’immédiat mais en plus il le fait face à l’allégorie du risque que court tout artiste. Cette allégorie est belle, brutale, elle a deux cornes et peut tuer sur-le-champ. Le taureau est la force au centre du débat, la puissance qui permet que l’art existe. C’est avec et autour de lui que tout se passe, c’est l’animal ultime, celui qui est porteur d’un héroïsme duquel aucun être humain ne peut se réclamer et je crois que c’est entre autres ce qui le rend sacré. Je ne peux pas m’en sentir proche. Je l’admire au-delà de tout. En ce sens, le ganadero possède aussi sa part artistique puisque par la sélection du bétail, il agit un peu comme un sculpteur. Il sculpte la nature pour que le taureau devienne toujours plus taureau, avec son trapío, sa morphologie, son comportement, son aura… parfois c’est vrai que c’est raté, mais c’est parce qu’il est condamné à manier le ciseau a vista de nas.

Novillo de Prieto de la Cal. Photo: Julie Bérard
E.T : Pourrais-tu en citer un, torero ou ganadero, duquel tu te sentirais le plus proche, ou que tu aimerais le plus ?
L.M : Un seul ? Non. J’en aime beaucoup pour leur façon de voir les choses. C’est un peu un piège…
E.T : Ou plusieurs…
L.M : Je suis par exemple un grand admirateur de Morante de la Puebla pour son jusqu’auboutisme, son indépendance, sa capacité à synthétiser les époques en s’élevant au-dessus des modes. Dans mon livre je parle de Paco Ureña que j’aime pour sa gravité et son classicisme, de Román Collado que j’adore pour son panache et son romantisme, de Juan Leal que j’admire pour son héroïsme qui me fait songer à celui des guerriers antiques… il y en a beaucoup d’autres... pour les ganaderos, je sais pas, il y en a des tas… regarde Victorino Martín, le lot de taureaux qu’il amène cette année à Madrid en clôture de la féria de San Isidro. C’était de la peinture sans cadre, des tableaux qui chargeaient, des monstres parfois imbuvables, parfois élégants, toujours dangereux, vibrants, âpres. Et d’ailleurs Paco Ureña leur a fait face avec un aplomb hors norme. Il a joué sa vie pour se sentir torero et le moins qu’on puisse dire, c’est que torero, il l’a été jusqu’au bout. Rousté, piétiné, mutilé, évanoui, il s’est toujours relevé pour présenter sa muleta et aller au bout de la bataille. Respect. Putain. Respect !

Paco Ureña face à un taureau de Victorino Martín. Madrid, le 4 juin 2023. Photo: Plaza 1
E.T : On va maintenant essayer de parler de ton parcours personnel. Pourrais-tu nous dire quel déclic tu as eu pour commencer à écrire et comment tu es devenu aficionado ?
L.M : Je sais pas… je pense que… je ne crois pas avoir eu de déclic… je crois que l’afición… je pense qu’en ayant grandi à Lansargues, dans les marais, le taureau a dû participer très tôt à ma mythologie primaire, infantile, je dirais, et au moment où cette mythologie naissait, c'est-à-dire celle des étangs, de l'horizon, du voyage, de la volonté, en tant qu’enfant des plaines, de pousser toujours plus loin, de voir des montagnes et d’aller les chercher puis de les dépasser, j’avais la sensation que je ne vivais pas les choses pour rien. Avant même de savoir écrire, je devais posséder quelque chose, je pense, qui relève d’un vécu à transposer. Je crois qu’après, quand on apprend à parler, quand on vit l’adolescence, on le sent, on commence à s’en rendre compte, alors on est très frustré parce qu’on ne sait pas comment faire, et puis après vient le moment où on y parvient… mais ça, si tu veux, je n’ai pas de déterminisme particulier, d’instant clef, je pense que, par un glissement naturel des choses, les mots me sont venus sur ce sentiment permanent de vécu à transposer, cette envie… pas de partager… plutôt de foutre à la gueule du monde ce qu’on a dans le bide.
E.T : En clair ce que tu me dis c’est que ça t’est venu mais que tu es incapable de dire comment… ou alors tu ne veux pas le dire…
L.M : Non, c’est vrai, j’en sais rien. Je t’assure. Je ne peux le comprendre qu’à travers ce que je mets instinctivement dans mes livres. Ensuite je le dis en faisant comprendre au lecteur ce que je comprends de moi. C’est le moteur de ma littérature. Je n’aurai pas assez de toute une vie pour parvenir à l’expliquer. Je ne suis pas doué pour l'exégèse. Je ne suis pas non plus un type à déclics, c’est comme ça. Je suis un type qui macère. Je vais pas t’inventer des histoires pour te faire plaisir ! Je suis fils d’ouvrier, petit fils de paysans, j’ai découvert le monde en regardant mon grand-père mettre des coups de sape dans la terre qu’il avait labourée… après, les plants de tomates poussaient lentement… à la fin je croquais dedans. C’est très cyclique tout ça, c’est pas des blagues ! Je vais pas te dire : Ô tendre instant sacré le jour où j’ai ouvert tel bouquin et ça part de là. Ce serait mentir. D’abord, je lisais pas. J’écrivais avant de lire, des textes bestiaux, des trucs assonancés à outrance avec des fautes d’orthographe et des pâtés d’encre. Enfant, adolescent, je lisais pas. Je suis pas un gars très cultivé. J’ai lu qu’après mes vingt ans. Là oui, disons techniquement, je pourrais décrire mon évolution. Un jour j’espère pouvoir publier ce roman que j’ai écrit, Des Cris dans les clous, qui s’apparente à de l’initiation dotée d’une quête sous-jacente, ou de plusieurs quêtes, on sait pas trop, mais bon, c’est une histoire d’amour raté, de rage, de jeunesse avec en parallèle une progression dans l’approche du monde et de la littérature, pour le style, le parti-pris, la culture mais temporellement parlant, c’est sur un an à peine, avec un narrateur qui entre dans l’âge adulte, ça ne parle pas d’un déclic…
E.T : Donc tu écris sur d’autres choses que la tauromachie…
L.M : J’écris sur moi, en premier. Je parle de moi. Mais je ne crois pas que beaucoup d’écrivains fassent quelque chose de différent que de parler en premier d’eux-mêmes, ils utilisent juste des moyens détournés. Moi, en général, je parle directement à la première personne. Ça m'évite primo les chichis, secundo d'avoir à cacher l'égocentrisme que comporte l'acte d'écrire. Peut-être qu’un jour je ferai différemment, je n’ai pas de dogme. Et j’ai encore des textes en stock, on va en parler, c’est important d’en parler, j’ai des récits, des poèmes et des romans qui parlent de ma jeunesse, de la vie, des femmes, de la politique, de l’amour, de l’art, mais ces textes ne sont pas encore publiés. Pour l’instant je publie mon premier livre et mon premier livre parle des taureaux parce que je pense que c’est par là qu’il faut que je commence. C’est le premier texte de qualité que j’ai écrit et c’est celui qui m’a permis de sortir de mon enfermement littéraire. Je l’ai produit il y a plus de quatre ans (c’est long quatre ans pour un écrivain, il a le temps d’évoluer et de porter un regard très critique sur ce qu’il a fait par le passé), ensuite j’ai essayé de le faire éditer mais les maisons d’édition, pour des raisons diverses, n’en ont pas voulu. Certaines ne m’ont pas répondu, d’autres m’ont dit que le récit leur plaisait mais qu’elles n’étaient pas certaines de pouvoir le vendre. C’est du moins comme ça que je l’ai compris. Ces refus m'ont intéressé parce qu'ils étaient motivés, personnalisés, et ils m'ont finalement donné confiance. Ensuite je l’ai envoyé à des écrivains, des lecteurs, des gens très sérieux qui m’ont encouragé en me disant que ce que je faisais était bon. Donc je me suis dit : Tu vas publier ton livre refusé par les maisons d’édition.
E.T : Ce n’est pas très vendeur…
L.M : C’est vrai qu’aujourd’hui, là, je fais un entretien, j’étais pas obligé de le dire. J’aurais pu dire : J’ai fait ça parce je veux mon indépendance. J’aurais presque pu faire un parallèle avec Morante… mais non, c’est pas ce que je veux, c’est pas vrai. J’ai essayé de rentrer dans un système qui m’a refusé. Je veux pas mentir là-dessus. Ça fait aussi partie de ma vision de la littérature de ne pas mentir. Dans un monde comme le notre, qu’est-ce qu’il faudrait ? Que j’aie des arguments de vente ? Que je donne des éléments de langage qui permettent de rendre mon livre « attractif » comme on dit ? Non. Ça fait partie de mon parcours artistique que d’avoir été refusé par les éditeurs et d’aller chercher les lecteurs moi-même. Et c’est pour ça que mon premier livre, A Fleur d’épée, je vais aller le vendre à la sortie des arènes, avec des prospectus, sur des marchés, des choses comme ça, et que j’ai aussi développé une boutique internet déjà disponible, au passage, sur mon site www.laurentmut.com. Le livre est là, il existe. La couverture est blanche, sans superflu, d'un blanc pur, un blanc de page blanche... maintenant il me reste à le faire parvenir au public.

E.T : Moi qui vis avec toi et qui partage ton intimité…
L.M : Alors c’est maintenant que tu te dévoiles, comme ça, sans prévenir, ça y est, on sait que c’est toi… Marie…
Marie : Oui bon ça va, au bout d’un moment… après sinon ça marche pas ma question et y’a plus rien qui tient…
Laurent : Alors on n'a plus qu'à dire aussi que ce blog c'est nous qui l'avons créé spécialement pour l'occasion. On va essayer de le faire vivre après. On ne promet rien. Mais on a décidé de s'en servir en premier pour bâtir un support virtuel qui a des chances de tromper le vide. Parce que pour avoir de l'écho, il faut de l'espace et l'espace, on se le crée.
Marie : C'est aussi simple que ça. La boucle est bouclée. On a tout dit. Maintenant on se sent plus légers. Continuons. Du coup, je disais que je suis avec toi et que je vois tous les refus que tu as reçus, les avis négatifs, les absences de réponses, y’a eu aussi euh… comment ils s’appellent la maison d’édition de Paris là ?
Laurent : Le Dilettante…
Marie : Oui voilà, eux, le Dilettante, un jour ils t’ont envoyé une réponse très directe, puis tu as participé à deux concours de nouvelles où tu n’as pas non plus été sélectionné, Mugron et le Prix Hemingway. Comment, toi qui es écrivain, ressens-tu ces refus ? Comment arrives-tu à vivre avec ?
Laurent : Je le prends quand-même un peu dans la gueule. Je vais pas te dire que j’en suis content et que je me torche avec. C’est pas vrai. Si j’ai participé à tout ça, c’est que j’ai voulu voir… je pense que c’est… d’abord l’édition : c’est très difficile quand tu arrives, que tu as une œuvre et que tu ne sais pas comment la distribuer. Tu vas passer par quels canaux ? Qu’est-ce que tu vas faire ? Sans les maisons d’édition, il va falloir que tu sois inventif. J’ai voulu savoir si les professionnels étaient prêts à me suivre et si mes livres allaient se vendre par leur biais. Pour l’instant ce n’est pas le cas. Je ne dis pas que je ne retournerai jamais vers les éditeurs avec mes romans parce que c’est très difficile de faire autrement… on verra bien. Pour la tauromachie c’est autre chose parce que certes j’ai été refusé mais il y a les arènes. Tout le monde s’y donne rendez-vous pour rendre hommage au taureau et parmi ces milliers de gens qui viennent à la corrida, il y en a forcément qui aiment lire. Ensuite les concours c’est encore autre chose parce qu’il y a un jury, d'autres participants… je crois que j’avais envoyé une nouvelle qui était bonne à Mugron et ça l’a pas fait… pourquoi ? On n’en sait rien. Ils n’ont pas motivé ma disqualification. Pour Hemingway, sans trop y réfléchir, j’ai pris les codes de la nouvelle pour les revisiter et ça, je crois que ça passe pas. Peut-être qu’il y a autre chose. J’en sais rien… mais ce dont je suis sûr c’est que je leur ai envoyé un texte que je trouve très bon même s’il n’était pas dans les clous. Je crois qu’inconsciemment, je me suis sabordé. Et ça, tu vois, ça m’emmerde… mais je suis obligé de faire avec. Je n’ai peut-être pas l’esprit concours, l’esprit de compétition. J'imagine mal ma littérature entrer dans le cadre d’un règlement. C’est peut-être un peu mon côté fierté, une envie de garder la tête haute, mais c’est vrai que je ne vois pas ma littérature entrer dans ce cadre-là.
Marie : Alors pourquoi y avoir participé ?
Laurent : Le Prix Hemingway est très connu. Tout le monde m’en parle depuis longtemps. Dans mes petites contradictions d’écrivain tourmenté, j’ai forcément pensé que ça m’ouvrirait des portes. Puis dernièrement, me voyant galérer, des gens très sérieux de mon entourage m’en ont reparlé alors que j’avais pris la décision de tenter le coup. Ils ont eu raison. J’y suis allé, ça l’a pas fait, au moins je sais que ce n’est pas pour moi. En plus j’ai écrit plusieurs nouvelles pour avoir le choix et ces nouvelles, elles existent encore. Rien n’est jamais perdu. Un écrivain ne fait jamais les choses pour rien. Ça aussi je l’ai appris. Peut-être qu’un jour j’aurai le plaisir de publier un recueil de nouvelles perdantes. Je trouverai un titre de circonstances (rires)…
Marie : Mais, une fois de plus, c’est pas très vendeur…
Laurent : Putain t’as raison. C’est vrai que j’aurais préféré arriver aujourd’hui en disant : Je suis finaliste du Prix Hemingway ! Ou alors, mieux : J’ai gagné le prix Hemingway ! Ça aurait été un lancement fabuleux pour mon livre. Eh bé non. J’ai fait des nouvelles, je le dis, j’étais pas obligé non plus, mais je le dis, j’ai été refusé, voilà, j’ai perdu…
Marie : T’as perdu mais ça t’empêche pas de continuer la littérature…
Laurent : Bien sûr que non ! Le monde, tel qu’il est aujourd’hui, n’est pas fait pour tolérer la littérature. A d’honorables exceptions près, tout est fait pour étouffer l’art et vendre, dans tous les domaines, des produits qui ensuquent. Partout on nous vante la banalité, le quotidien, l’illusion du bien-être, le loisir. On vit dans une société de mensonge et de paraître animée par un besoin permanent de prendre le dessus sur l’autre que les plus forts cachent de façon toujours plus hypocrite, et ce fond là, d’ailleurs, n’est pas propre à la société d’aujourd’hui, il y a quelque chose de profondément humain dans la médiocrité ambiante. Je crois qu’écrire, entrer en littérature, c’est devoir composer avec ça, le mettre en forme. Aujourd’hui plus que jamais, on met en avant le winner, celui qui a gagné. Eh bé moi j’ai pas gagné le prix, j’ai perdu, et je dis aux gens qui vont lire l’entretien : achetez le livre du looser. Vous verrez ce que c’est qu’un perdant. Vous saurez que dans l’échec communément admis par la société, il y a peut-être une part de triomphe. Et cette part là, si elle existe, c’est en me lisant qu’on peut essayer de la sonder. Parce qu’il faut relativiser l’échec aussi…
Marie : C'est-à-dire ?
Laurent : Qui a réussi ? Comment on réussit ? En accumulant des capitaux ? En investissant ? En gagnant des élections ? En possédant des GAFA ? C’est quoi la réussite ? Avoir une Rolex ? Habiter l’Elysée et faire passer des lois en force ? Avoir une belle bagnole ? Lancer des satellites privés dans l’espace ? Vendre des millions d’exemplaires ? Ces réussites-là sont tout au plus des petits caprices d’enfants que la laideur des adultes dénature. Derrière ce que la société monte au pinacle se cache toujours une banalité qui m’exaspère. Alors l’échec… qu’est-ce qu’un échec ? On présente un texte, il y a un jury de gens… peut-être des gens très bien… je sais pas moi, je sais pas qui c’est… je ne connais pas leurs goûts, leurs critères… je les connais pas… j’ai pas de contact dans le milieu de la littérature, je connais deux ou trois personnes par-ci par-là qui sont des gens très bien et qui sont peut-être comme des arbres qui cachent la forêt, je sais pas, je peux pas savoir. Si j’étais en mesure d’en dire plus, ça signifierait que j’ai gagné, alors là, je serais peut-être content. Si ça se trouve, je m’en servirais pour faire ma pub. Tu te rends compte ? Finalement, c’est pas si grave d’avoir perdu, c’est même mieux, ça me permet de ne pas avoir d’autre choix que de dire les choses comme je les dis là et je trouve ça très bien.
Marie : J’avais préparé une question mais maintenant je trouve ça con… au début je voulais te demander de parler d’auteurs qui t’ont inspiré dans ton parcours d’écrivain…
Laurent : Beh c’est pas con ça…
Marie : Mais maintenant j’ai envie de te demander : De qui veux-tu parler ?
Laurent : Encore mieux !
Marie : Parce que dans un parcours d’écrivain, tout se mêle, ce n’est pas que de la littérature.
Laurent : Voilà. Eh bé là, euh, dernièrement, j’ai écrit… je vais écrire un… enfin, je publie mon premier livre mais comme je le disais, j’en ai d’autres en stock dont un second sur la corrida que j’espère pouvoir publier si les ventes du premier me le permettent, et pour ce livre-là, pas A Fleur d’épée donc, le suivant, j’ai réfléchi et je me suis beaucoup renseigné sur le parcours des toreros que je vois comme des artistes maudits. C'est-à-dire que même s’ils parviennent dans l’instant à toucher la gloire, cette gloire arrive avec son éphémère. D'abord ils ont contre eux une bonne partie de la société qui rejète d'emblai leur art pour des raisons morales jusqu'à parfois se réjouir publiquement si par malheur ils meurent en le pratiquant. Ensuite, à l'intérieur de l'arène, le fait qu’ils soient soumis au jugement immédiat d’un public susceptible de les descendre à tout moment alors qu’ils se jouent la vie représente un poids considérable qui tourmente leur travail d’artiste. Morante de la Puebla, par exemple, pour en revenir à lui, essuie parfois des broncas terribles. En son temps il y avait Rafael de Paula dont on parle beaucoup et que je n’ai pas vu toréer puisque je suis trop jeune. On pourrait aussi parler de Rafael « El Gallo », le divin chauve de Séville, au début du siècle dernier… il existe des types qui n’ont pas peur de la bronca, du « fracaso » comme on l’appelle, ou qui du moins arrivent à lui faire face parce qu’ils ont la conviction que c’est la plus juste manière de montrer la vérité. Ces artistes-là s’ouvrent devant le monde. Et c’est aussi une sacrée porte ouverte pour relativiser l’échec. Quand tout le monde pègue une bronca à Morante, qu’il sort des arènes de Madrid sous une pluie de coussins, quel est son échec ? D’être incapable de tricher ? Parce que c’est ça, au fond. Les gens, pleins de certitude sur le spectacle qu’ils viennent voir, ne conspuent rien d’autre que l’incapacité de Morante à leur mentir, petitement, bourgeoisement, rien de plus.

Morante de la Puebla sifflé à Madrid. Mai 2022. Photo : Plaza1
Alors moi, pour faire des parallèles littéraires, j’ai cherché sur Van Gogh, j’ai cherché sur Antonin Artaud, des types qui ont beaucoup « échoué » et que la société a montrés du doigt. Van Gogh s’en est tué. Artaud, qui s’est battu, qui appelait Van Gogh le suicidé de la société, il faut voir avec quelle violence la société l’a traité. Il faut voir les photos d’Antonin Artaud à la fin de sa vie, après des internements et des électrochocs, les dents cassées, la gueule blessée. Sur Artaud et Van Gogh, Marc-Edouard Nabe a beaucoup écrit et Nabe lui-même, qui est à mon sens le plus grand écrivain français vivant, est aujourd’hui très peu lu. Sa trajectoire se trace même hors d’un système éditorial qui ne lui aurait peut-être jamais permis de publier les chefs d’œuvre qu’il sort à son compte depuis près de quinze ans. Pourtant, pour les écrivains de ma génération, il est crucial. Même à mon niveau, en plus de l'inspiration, son parcours donne une certaine confiance. Il ouvre une brêche, c'est indéniable. On pourrait parler de Federico García Lorca aussi, qui a fini devant un peloton d’exécution pour avoir été poète, pour avoir été catalogué comme représentant le mal et tué, en plus de ça, par des Andalous alors qu’il n’existe peut-être pas de poète qui ait mieux décrit l’Andalousie, son génie, son fluide que Lorca lui-même. Et ce que lui rend l’Andalousie, c’est un peloton d’exécution sur un bord de route avant de balancer son cadavre dans une fosse commune.

Federico García Lorca. © Famille Lorca/Sipa
Marie : Tu aimes qu’on dise la vérité, d’accord, mais selon toi, que voudrait dire tromper, en tauromachie ou en littérature ?
Laurent : Tromper ?
Marie : Est-ce qu’on peut tromper le public ?
Laurent : Je sais pas, je…
Marie : Ou se renier... est-ce qu’on peut se renier dans ces deux domaines ?
Laurent : On peut se renier en littérature, peut-être, en aimant quelque chose d’une part et en produisant ce qui fonctionne d’autre part. Oui. En aimant une certaine littérature qui va être lue par certains écrivains… je pense à un auteur qui s’appelle Pierre Michon, qui ne touche pas le grand public, eh bien certains écrivains vont lire Pierre Michon, aimer sa littérature, trouver qu’il touche au vrai, mais quand ils vont écrire, eux, ce sera pour un lectorat, pour fonctionner, pour élargir leur public et en un sens, ce public-là, ils le trompent en essayant de faire des romans à succès. J’aimerais bien dire que c’est facile de se renier mais je n’en suis pas sûr parce que je ne crois pas être capable d’écrire un roman à succès. Pourtant je pense que je suis bon écrivain. Donc c’est compliqué. Disons que je ne possède pas les moyens techniques de me renier… en tauromachie, je sais pas, je suis pas torero.
Marie : Par exemple Juan José Padilla s’est beaucoup fait critiquer par certains aficionados qui disaient qu’il toréait le public, qu’il tournait autour des taureaux, est-ce que tu penses que, d’une certaine façon, c’est se renier ou tromper le public ?
Laurent : Parfois on ne trompe que les gens qui ont envie de se faire tromper. Est-ce que les gens étaient vraiment trompés ? Je sais pas, je crois pas… Padilla avait un grand panache, c’était un torero rompu au métier, parfois habile, mais qui avait surtout un grand panache et les gens allaient voir ça. Son énergie lui permettait d’évacuer les questions techniques, froidement théoriques, non pas en trichant mais en écrasant tout par panache, par courage. Peut-être que ceux qui se trompaient étaient la minorité d'aficionados qui montraient du doigt le grand public majoritaire en le croyant berné alors que c'était ce dernier qui, parce qu'il escampait l'encyclopédie pour céder à l'émotion de l'instant, possédait la clairvoyance. Mais je ne crois pas qu’on puisse vraiment faire un parallèle franc avec la littérature commerciale parce que Padilla, quand même, avec les coups qu’il a pris et les blessures qu’il a reçues, il avait sa personnalité propre, sa brutalité, cette animalité presque surnaturelle, cette belle sauvagerie exubérante qui brûlait l’air quand il était face au taureau. Après, oui, quand on est dans le public, on aime ou on n’aime pas, pour diverses raisons, bonnes ou mauvaises, peu importe. C’est autre chose. Mais ce qui est sûr c’est qu’on ne peut accomplir le destin de Padilla qu’en étant soi-même. Il n’y a qu’un seul Padilla. Celui qui se renierait pour essayer de faire ce qu’a fait Padilla toute sa vie, il tiendrait pas deux secondes, l’histoire le balaierait. Et l’histoire, on comprend bien que dans ce cas-là c’est le taureau qui la symbolise. Attend, on parle d’un mec égorgé, énucléé, scalpé, défiguré, le corps couvert de cicatrices qui allait encore se mettre à genoux entre les cornes à quarante ans passés…

Juan José Padilla lors de sa dernière corrida à Nîmes en 2018. Photo: Christine Nuel
Marie : On ne peut donc pas dire que c’est le Beigbeder des toreros…
Laurent : Non. Vraiment non. Ce serait faire mal à Padilla que de le comparer à Beigbeder. Non. Non. Mais je crois que Beigbeder non plus ne trompe pas grand monde et qu’il ne se trompe pas lui-même…
Marie : Ou alors Schmitt… non. Comment il s’appelle déjà ? FOG ? Non, Schmitt… c’est bien Schmitt ?
Laurent : Je crois que c’est pareil tout ça. Même si ce n'est pas le même genre d'écrivain. On ne peut pas… non. Le plus exubérant des toreros, le plus mainstream, on va dire, des toreros, est sans commune mesure avec ces gens-là. Ça n’a rien à voir.
Marie : Une autre question, tu…
Laurent : Le plus « grand-public » des toreros, disons, voilà, parce que, finalement, c’est du public qu’on parle. Qu’est-ce que le public, dans un moment donné, est prêt à recevoir ? Est-ce que les cent-mille personnes, je sais pas si c’est cent-mille d’ailleurs… peu importe… est-ce que les milliers de gens qui achètent le dernier livre d’Eric-Emmanuel Schmitt sont les mêmes que les quatorze-mille qui remplissent les arènes le soir de la despedida de Padilla à Nîmes ? Je sais pas. Et même si quelques uns font les deux, qu’ils vont voir Padilla après avoir lu Schmitt, est-ce qu’ils y cherchent la même chose ? Je ne crois pas.
Marie : Quand tu parles de tout ça, on se rend compte que tu es très passionné. Pourrais-tu vivre sans taureaux ou sans littérature ?
Laurent : Non.
Marie : …
Laurent : Mais on n’a pas beaucoup parlé de La Chevelure d’André…
Marie : Eh oui parce que…
Laurent : On en parle tout de suite ?
Marie : Eh bé mais…
Laurent : La Chevelure d’André, bioulas, c’est quoi ? C’est qui ? C’est ? C’est ?
Marie : …
Laurent : C’est nous !
Marie : C’est nous. Oui. Bon. Ça va. Calme-toi. J’y viens. C’est vrai qu’on a beaucoup parlé de tes refus mais il y a quand même un petit succès, La Chevelure d’André…
Laurent : Avec ses followers !
Marie : Est-ce que tu peux nous expliquer comment ça s’est créé et de quoi vous parlez… enfin, de quoi parle-t-on ?
Laurent : On parle de taureaux ! De l’afición romantique ! Laurent et Marie parlent de l’afición romantique !
Marie : Comment La Chevelure d’André s’est-elle créée ?
Laurent : On a vu Roca Rey toréer cheveux aux vents à Nîmes ! Enfin, d’abord on l’avait vu à Séville dans deux vueltas dantesques avec bronca au palco parce qu’il lui refusait la Porte du Prince. Ses grands cheveux volaient. Puis il s’arrange très bien avec le vent quand il est face aux taureaux. C’est constant. C’est même impressionnant. Nombre de fois, à Valencia, Pampleune, Bilbao, on l’a vu s’accommoder des rafales pour triompher au-delà du danger. Parce qu’il faut rappeler, pour les gens qui ne connaîtraient pas la corrida, que le vent soulève le tissu de la muleta et rend le torero plus vulnérable. Puis, concernant Roca Rey, il y a eu Nîmes, quand il toréait cheveux au mistral pendant cette corrida épique de la féria des Vendanges au cours de laquelle Juan Leal se fait briser les côtes et triomphe avant de partir à l’infirmerie parce qu’il s'écroule en piste à cause d'une réaction à l’anesthésiant. Roca Rey aussi avait été énorme ce jour-là et le soir, dans les bodegas, Andrés est devenu André parce qu’on voulait le franciser, on en avait besoin. Alors après, par une sorte de romantisme byronien, on peut se dire que l’épopée taurine et poétique vogue derrière ceux qui l’engendrent pareille à la chevelure des conquérants. Oh putain c’est beau ça ! Hein ?
Marie : Pffff…
Laurent : Au début, il me semble qu’on voulait créer une peña mais ensuite, pour ne pas trop s’enflammer, on s’est orienté vers une page Facebook. Ensuite cette page, on l’a confectionnée à Madrid, l’an dernier, pour la féria d’automne, et on a trouvé l’idée du lancement en buvant du vermouth au bar El 2D, dans le quartier de Malasaña, sur la plaza Dos de Mayo !

Andrés Roca Rey à Nîmes. Féria des Vendanges 2022. Photo: Christine Nuel
Marie : Est-ce que tu peux nous parler de l’épigraphe ?
Laurent : …
Marie : Non ?
Laurent : Mais c’est qui La Chevelure d’André ? C’est qui ? C’est ? C’est ?...
Marie : …
Laurent : C’est nous ! Allez viens, mets-toi à côté de moi, on va faire une photo…
Marie : Mais non, on n’a pas fini…
Laurent : Ah merde. Mais on fait une photo quand même, ça fait une demi heure qu’on parle. J’en ai marre. Ça m'emmerde.
Marie : Non, d’abord on termine sur La Chevelure d’André.
Laurent : D’accord.
Marie : Peux-tu nous dire quel est le but de cette page ?
Laurent : Le but c’est d’aller chercher la poésie dans l’immédiat du fait taurin et de l’extirper de son actualité pace que cette actualité fait histoire, mais pour prouver qu’elle fait histoire, qu’elle n’est pas qu’une actualité banale noyée dans le bandeau des chaînes d’info en continu (par lesquelles la corrida n’est d’ailleurs presque jamais traitée), il faut la passer à la moulinette du travail littéraire. Donc on écrit des textes, des billets d’humeur, des citations ou des poèmes courts et on essaie d’être les premiers, dès la sortie des arènes, à publier des reseñas du cru, qui au fond n’en sont pas vraiment, des reseñas. Notre but, comme le mien dans mes livres, c’est de restituer le présent plein de passion et de vigueur de la corrida, de le magnifier en trouvant une langue qui évolue, qui surprend les gens et me surprend parfois moi-même, une langue très personnelle tirée des termes techniques des revisteros (les chroniqueurs spécialisés), des journaux taurins, de l’espagnol ou de l’occitan mélangés à des anglicismes et même à des mots inventés qui peuvent parfois être le fruit de tout ce que j’ai cité et qui, en disant quelque chose de façon décalée, agrémentent le rythme. Peut-être que c’est parfois dur à saisir pour le néophyte mais l’avantage c’est que j’estime aussi que mon travail est novateur vis-à-vis du connaisseur, donc chacun, qu’il soit aficionado ou non, peut se l’approprier pour deviner ce qu’il s’est passé de bon ou de mauvais dans l’arène, ce qu’on a vu, nos impressions dans différentes rubriques, parfois avec humour, d’autrefois avec gravité… et puis je vais pas t’apprendre que le récit taurin est très subjectif, donc dans tout ce que je dis ou écris, j’ai conscience de ne donner que ma petite part de la grande vérité de l’arène. Pour finir j’en conclus qu’à l’heure actuelle, me concernant, la page Facebook est le meilleur support pour innover en matière d’écrits taurins tout en étant lu.
Marie : Pour finir, on l’a dit, on est là pour ça, c’est le lancement de ton premier livre. As-tu prévu un évènement ?
Laurent : Oui ! Je le vends pour la féria d’Istres, sur le marché de la féria, devant les arènes, à partir de 17h le 16 juin. J'y serai tout le weekend. Les gens pourront me rencontrer avant d'entrer ou en sortant des corridas. Dans le même temps, désolé si j’insiste, le livre est déjà disponible en ligne sur mon site internet www.laurentmut.com. C’est par là qu’on peut me suivre avec entre autres un lien qui mène sur La Chevelure d’André. De quoi être au courant des nouveaux points de vente itinérants qui viendront se greffer au cours de la temporada…
Marie : Donc rendez-vous du 16 au 18 juin !
Laurent : On y sera !
Marie : Eh bé voilà…
Laurent : Voilà quoi ?
Marie : C’est fini…
Laurent : Déjà ?
Marie : Tu te fous de ma gueule ?
Laurent : On prend la photo ?
Marie : Quelle photo ?
Laurent : La photo de fin, avec la devanture du bar en fond pour bien conclure. Viens te mettre à côté de moi.
Marie : Putain que t'es dirigiste ! Un selfie en plus ?
Laurent : Le premier, le plus beau, le plus grand ! Allez viens ! Viens t’assoir. Là, voilà. On fait comme Paulo Anarkao, vas-y, on fait blablablaaa, blablabla puis on rigole. Ha-ha-ha…
Marie : Ha-ha-ha… (rires)
Laurent : Ha-ha-ha ! (clic) vendu (rires). C’est dans la boîte.

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